Une profession qui s’organise : L’Office Professionnel de Qualification des Urbanistes

A profession which organises itself: the Office Professionnel de Qualification des Urbanistes (the Urban Planners Qualification Professional Office)

Anne-Michèle Donnet

p. 224-233

Citer cet article

Référence papier

Anne-Michèle Donnet, « Une profession qui s’organise : L’Office Professionnel de Qualification des Urbanistes », Cahiers RAMAU, 2 | 2001, 224-233.

Référence électronique

Anne-Michèle Donnet, « Une profession qui s’organise : L’Office Professionnel de Qualification des Urbanistes », Cahiers RAMAU [En ligne], 2 | 2001, mis en ligne le 08 novembre 2021, consulté le 04 décembre 2024. URL : https://cahiers-ramau.edinum.org/543

Après avoir rappelé la démarche ayant abouti à la création du Conseil Français des Urbanistes, cet exposé présente les objectifs de la mission de service public que s’est donnés l’Office Professionnel de Qualification des Urbanistes. Elle décrit ensuite les parcours professionnels nécessaires à l’obtention d’une qualification auprès de cet Office et les diverses missions qui doivent avoir été effectuées (par exemple : conseil et assistance à maîtrise d’ouvrage, réalisation d’études pour l’aménagement du territoire, la planification urbaine, etc., élaboration de directives et de schémas d’aménagement du territoire, de documents d’urbanisme, etc.). Elle décrit alors le processus d’attribution de la qualification. En complément de cet exposé, l’auteur répond à plusieurs questions concernant l’accès à la profession, la formation des institutions mises en place, la prise en compte des formations existantes (instituts d’urbanisme, DESS), la qualification éventuelle de personnes provenant d’autres professions, la pratique de l’urbanisme dans le cadre essentiellement public pour un statut proche du libéral.

The author first reviews the approach which resulted in the creation of the “Conseil Français des Urbanistes” (French Urban Planners Council) and then presents the public service mission objectives of the “Office Professionnel de Qualification des Urbanistes”. She describes the professional courses required by this Office for obtaining such a qualification and the various missions that must have been performed (i.e. commissioning consulting and advising, land planning studies, urban planning, drawing up of land planning schemes and directives, drawing up of urban planning documents,…). Then, she explains the way a qualification is awarded. After this exposition, the author answers several questions about access to this profession, the composition of the institutions, the way existing education is taken into account (urban planning institutes, DESS), the possible qualification of people coming from other professions, the practice of urban planning within a mainly public framework with a nearly liberal status…

Ces quelques lignes de Jean-Pierre Frey (Frey, 2001) campent bien l’émer-gence de cette profession dont le nom apparaît pour la première fois en 1910 ; le terme urbanisme quant à lui naît en 1911.

Plusieurs professions travaillent l’espace, les architectes, les paysagistes, les ingénieurs… Différentes formations collaborent, économistes, sociologues, spécialistes des transports ou de l’habitat… Les structures d’exercice sont elles aussi diverses, en libéral, au sein des collectivités locales, au sein de l’état, dans le secteur parapublic…

L’organisation de cette diversité en une profession pour permettre sa visibilité, en faire un interlocuteur identifiable et pour faciliter une mobilité interne s’est imposée. Plusieurs « familles » de professionnels, la Société Française des Urbanistes, la Fédération Nationale des Conseils d’Architecture, d’Urbanisme et d’Environnement, la Fédération Nationale des Agences d’Urbanisme, la Fédération Nationale des PACT-ARIM, l’Association des Personnels Urbanistes des Collectivités Territoriales (devenue Urbanistes des Territoires), l’Association des Urbanistes dans l’État, se sont engagées dans une démarche pour « Promouvoir l’urbanisme ». Des commissions ont travaillé sur une définition de la profession, ont élaboré une charte et ont mis en évidence le besoin d’un organisme de qualification. La comparaison avec les autres pays européens et le souhait d’associations d’élus ont confirmé ce besoin.

Le Conseil Français des Urbanistes s’est créé à partir de cette démarche et l’Office Professionnel de Qualification des Urbanistes a été constitué le 3 avril 1998 avec le soutien de l’État et un Commissaire du Gouvernement siège au Conseil d’Administration. Son action s’inscrit dans les principes de la charte européenne des urbanistes de 1988. Dans le cadre de sa mission de service public l’OPQU s’est donné six objectifs principaux :

  • définir et faire évoluer la qualification professionnelle ;

  • déterminer le degré d’aptitude (ou de qualification) professionnelle pour que cette profession s’exerce dans des conditions administratives et techniques satisfaisantes ;

  • établir les dispositions dans lesquelles sera attribuée la qualification ; ces dispositions sont inscrites dans le Règlement Intérieur et pourront évoluer en fonction des évaluations qui seront réalisées ;

  • attribuer la qualification à toutes les personnes qui rempliront les conditions précisées au Règlement Intérieur, pour une durée limitée et renouvelable de cinq ans ;

  • contribuer à l’évaluation des formations liées à la qualification professionnelle et proposer, le cas échéant, des aménagements nécessaires ;

  • porter ces décisions à la connaissance des tiers par tous moyens appropriés, tels que publication d’annuaires, listes de références, etc.

Sur ces bases un processus a été défini et est mis en œuvre depuis juin 1999.

Toute personne voulant obtenir la qualification s’adresse à l’OPQU pour demander un dossier. Ce dossier doit être complété, trois études significatives sont jointes et le tout est renvoyé à l’OPQU. Le dossier est sans doute un peu lourd et demande environ une journée pour être rempli. Pour tenir compte des parcours professionnels différents plusieurs modes d’accès sont possibles :

  • une formation supérieure de niveau Bac+4, complétée par une formation de troisième cycle en urbanisme de type DESS et une pratique professionnelle de deux ans ;

  • une formation supérieure de niveau Bac+4 et une pratique professionnelle de cinq ans ;

  • une pratique professionnelle de dix ans.

Les jeunes diplômés peuvent demander un certificat provisoire dès l’obtention de leur diplôme, sans pratique professionnelle. Ce certificat est accordé pour deux ans. L’urbanisme doit être l’activité principale du demandeur. L’évaluation du dossier se fait en fonctions des échelles1 auxquelles ont été remplies les différentes missions présentées. Neuf missions sont identifiées :

  • conseil et assistance à la maîtrise d’ouvrage ;

  • réalisation d’études pour l’aménagement du territoire, la planification urbaine, le développement local, l’urbanisme, la politique de la ville et de l’habitat et les projets d’aménagement, dans l’optique du développement durable ;

  • élaboration de directives et de schémas d’aménagement du territoire, de documents d’urbanisme et de planification urbaine ;

  • gestion du droit des sols et des politiques foncières, d’équipement, d’habitat, etc. ;

  • élaboration et évaluation des politiques publiques, des actions et des réalisations de l’ensemble des acteurs ;

  • assistance à la maîtrise d’œuvre ;

  • direction d’études, direction d’équipes ou de projets et responsabilités d’études ;

  • formation et information ;

  • recherche.

Le dossier complet est instruit par trois urbanistes choisis2, un rapporteur membre de la commission d’instruction, deux urbanistes choisis désignés par le Conseil d’Administration, dont l’un de la même région que le candidat. Après analyse du dossier, la commission d’instruction donne son avis. Le Conseil d’Administration décerne la qualification. Un recours devant la commission de recours est possible. Aujourd’hui, en février 2001, 985 dossiers ont été demandés, 178 demandes de qualification ont été enregistrées, 66 qualifications ont été attribuées, 23 qualifications ont été refusées. Ce sont les débuts d’une démarche qui se met en place. Il faut ajouter que l’absence de qualification n’interdit pas de travailler dans le domaine de l’urbanisme. Il ne s’agit pas de la constitution d’un Ordre, ni de la création d’une licence d’exercice.

Débat

Un intervenant : Je suis très intéressé parce que je suis Urbaniste de l’État. En revanche, je ne déposerai pas de dossier de demande de qualification. J’ai le sentiment de voir apparaître une volonté de formalisation de la profession pour différents secteurs professionnels, État, privé, collectivités locales, et il me semble qu’on part sur un modèle calqué sur celui des architectes avec des études, différentes échelles… Est-ce qu’une grande entreprise d’ingénierie de l’eau (je pense à BRL, Sadréa, etc.) ne peut pas être qualifiée d’urbaniste ? En effet en s’occupant des infrastructures urbaines, ce type d’entreprise fait de l’urbanisme et qui plus est de l’urbanisme amont au développement d’une ville. J’ai peur qu’on mette en place un corporatisme qui ait pour but de permettre à quelques-uns de maîtriser les processus d’aménagement d’une ville. Or la réalité économique est multiforme et ne rentre pas dans ce cadre corporatiste.

Anne-Michèle Donnet : D’abord il ne s’agit pas d’un titre protégé : il n’est pas question d’interdire l’accès de quiconque à l’exercice de la profession. Ensuite, la qualification de groupes, d’agences ou du moins d’un exercice collectif est évoquée fréquemment mais cette éventualité est pour le moment reportée à plus tard, les questions soulevées étant assez complexes. Enfin, quant à savoir si l’urbanisme est fait par des intervenants tels que les sociétés fermières distributrices d’eau, les afficheurs, les fabricants d’automobiles ou d’autres, c’est une question extrêmement intéressante mais sur laquelle je ne me prononcerai pas maintenant.

Un intervenant : Si j’ai bien compris, il n’y a pas de collège à l’intérieur de cette instance de qualification, comme par exemple un collège d’urbanistes, un collège de maîtres d’ouvrage, un collège d’aménageurs, etc., pour positionner cette qualification et lui donner une certaine légitimité par la participation de professionnels autres que les urbanistes. Le risque est d’avoir un système d’auto-qualification qui n’aurait pas une grande légitimité.

Anne-Michèle Donnet : Sans qu’il y ait de véritable collège, une première évolution ou clarification, a déjà eu lieu. Les deux Fédérations Nationales, celle des CAUE et celle des agences d’urbanisme, qui sont plutôt des représentants d’employeurs, ont laissé la place à des associations des personnels urbanistes de ces organismes mais sont restées membres associées du CFDU. De même l’État est membre, au travers de son commissaire du gouvernement, de l’OPQU. Et je vous rappelle le soutien de l’Association des Maires de France. Pour ce qui concerne la légitimité de la qualification, la commission d’instruction s’est beaucoup interrogée sur la capacité à apprécier ce qui était présenté. Les raisons de qualification ont été explicitées. Un guide d’instruction a été mis au point par les urbanistes instructeurs. Il évoluera avec le temps. En cas de contestation, un recours peut être fait auprès de la commission de recours. En outre cette qualification a une durée limitée de cinq ans. Au terme de ces cinq ans la qualification doit être redemandée, avec la même procédure, à savoir une activité principale dans l’urbanisme, organisée au travers de missions et d’échelles et avec la production de trois études…

Jacques Allégret : Dans l’état actuel des choses, un architecte-urbaniste nous a déclaré qu’il ne demandera pas cette qualification, qu’il n’en a pas besoin. Les diplômés des instituts d’urbanisme viennent-ils demander cette qualification ? Le diplôme est-il suffisant pour l’obtenir ou doivent-ils témoigner d’une activité professionnelle ?

Anne-Michèle Donnet : Les diplômes des instituts d’urbanisme ou les DESS permettent une certification provisoire sans exercice professionnel, pour une durée de deux ans. L’OPQU, en liaison avec l’APEREAU, s’est penché sur les formations existantes qui délivrent des diplômes en urbanisme pour connaître les programmes, les cycles ; soit pour reconnaître ces formations, soit pour faire des propositions pour les compléter.

Thérèse Evette : Se dessine-t-il un profil des compétences, des doctrines ou un esprit vers lesquels évoluerait cette profession et qui constitueraient des lignes directrices ? Ensuite le rapport avec d’autres professions, d’autres intervenants a-t-il joué un rôle, soit pour se définir par rapport aux autres, soit comme élément de compétence ? Comment interviennent les autres ? Comment se définit une identité et comment est traitée la capacité à travailler avec d’autres ?

Anne-Michèle Donnet : Au fil des dossiers traités on s’aperçoit qu’il est plus simple d’apprécier un dossier préparé par un professionnel libéral. Ils ont l’habitude de présenter des dossiers, d’identifier ce qu’ils font et de le mettre en valeur. En revanche, on a beaucoup plus de mal à ce que des professionnels qui travaillent dans des structures, comme les agences d’urbanisme ou l’État identifient et formalisent eux-mêmes leur part du travail. Ils identifient mal comment ils ont élaboré et mis en œuvre une stratégie, ce qui leur revient et ce qui est dû au programme qui leur a été donné. Par ailleurs certains dossiers peuvent poser problème, quand ils sont trop strictement centrés sur une thématique. Des économistes, des ingénieurs transports, des professionnels de l’habitat reconnus et incontestablement compétents dans leur domaine nous posent question. On attend d’un urbaniste une vision plus large et une capacité à harmoniser et à intervenir dans plusieurs domaines.

Roger Perrinjaquet : Lorsque vous dites qu’à l’étranger ce type de certification existe, qu’avez-vous regardé à l’étranger sur le conflit en urbanisme ? Si je pense à la situation en Allemagne, il y a un clivage très net entre un planificateur urbain et un aménageur du territoire. Je choisis volontairement des mots qui ne correspondent pas au champ sémantique. Le clivage est très net. Les formations sont différentes et il me paraît aller de soi que ces termes n’ont rien à faire ensemble. En Suisse, les urbanistes sont des gens qui sont issus de formation de géographes, de sociologues, d’historiens et qui ont une espèce de « blanchiment » de diplôme. Je vois des situations extrêmement diverses. Ne seriez-vous pas en train de consolider une représentation d’une activité qui n’existe pas ailleurs ?

Anne-Michèle Donnet : Je n’ai pas forcément tous les éléments pour vous répondre. Je sais que les statuts de l’OPQU ont été définis en référence à la charte européenne des urbanistes de 1988 et que l’exercice des professions est forcément en train d’être étudié pour aller vers une intégration par la Communauté Européenne. Si c’est insuffisamment représentatif, cela pourra évoluer.

Jacques Allégret : Mon intervention précisera peut-être la réponse à la question de Thérèse Evette : vous délivrez une qualification unique de généraliste. Vous n’avez pas d’expertise prévue telle que urbaniste commercial ou autre… Il y a donc forcément une référence à un élément doctrinal fort.

Un intervenant : Celui-ci ne dépend pas d’une formation particulière : on peut devenir urbaniste qualifié avec une formation de géographe, d’historien, etc.

Guy Tapie : L’OPQU a été créé en 1998 et un protocole a été signé avec le ministère de l’Équipement. Il y a quand même des représentants de la société civile autres que les professionnels. Normalement il devrait y avoir tierce partie, ce qui n’est pas le cas.

Anne-Michèle Donnet : Là aussi, les choses pourraient évoluer, avec peut-être des ouvertures vers les collectivités locales, les associations de maires, ouvertures vers les associations d’employeurs ou vers d’autres professions…

Jean-Michel Dossier : Je suis commissaire du gouvernement à l’OPQUBI et je me bats pour qu’il y ait tierce partie, une réduction des nomenclatures, une transparence des procédures, pour qu’il y ait des procédures d’appel, pour qu’il y ait des maîtres d’ouvrages et des assureurs dans les processus de qualification. Ceci afin d’obtenir un véritable travail de qualification. Et je vous vois partir, avec de bonnes volontés, dans un processus d’auto-qualification par des urbanistes, qui eux-mêmes vont ensuite se soumettre à la qualification. Et ceci à l’aube d’une politique de qualification chez les urbanistes. Je me pose aussi la question de savoir si c’est bien le rôle de l’État d’intervenir dans la qualification de professions privées.

Un intervenant : Je pense qu’à partir du moment où l’État s’engage vis-à-vis d’un groupe professionnel, c’est aussi une clôture. Cela ne me choque pas, c’est ainsi que cela fonctionne. Il n’y a pas de connotation négative dans le terme de clôture. Tous les groupes professionnels fonctionnent ainsi et je ne vois pas comment cela pourrait fonctionner autrement. Il faut bien définir des limites, même si la définition de ces limites est quelque chose de très fluctuant, de très difficile, dans toutes les professions (y compris dans la médecine avec la médecine parallèle…). Toutes les professions sont confrontées à ce problème. J’aurais aimé savoir comment vous vous représentez, en tant qu’expression de différents champs professionnels assez différents à l’origine. J’ai vu quelques prises de positions de certaines associations de géographes-urbanistes, vis-à-vis des écoles d’architecture, par exemple. C’est complètement détonnant : on réunit dans un même champ des gens qui ont à l’origine des formations disciplinaires relativement différentes. On peut y voir une richesse mais cela peut aussi créer des difficultés pour trouver des formes d’intégration. Comment l’intégration des formes divergentes se déroule-t-elle ? Comment le Conseil Français des Urbanistes, par exemple, a-t-il résolu cette question ?

Anne-Michèle Donnet : au delà des « familles » constitutives du CFDU et de l’OPQU, il y a l’ancrage régional, avec les associations régionales. Le but est de dynamiser ou tout au moins de favoriser des noyaux de réflexion et de travail sur la définition du métier et sur ses conditions d’exercice. Il s’agit également de travailler sur une déontologie. Il n’y en pas encore puisque la profession n’est pas encore organisée. Il s’agira aussi de travailler sur la reconnaissance de ce métier. Il a de nombreux débats, ce n’est pas forcément simple mais ces débats sont nécessaires et riches.

François Lautier : Vous disiez tout à l’heure que les libéraux avaient plus de facilités à présenter leurs dossiers que ceux qui travaillent dans des structures, en particulier de type agence d’urbanisme, ce qui représente la grande majorité. J’ai deux questions à poser : j’aimerais connaître la proportion, même approximative, de ceux qui sont plutôt libéraux et de ceux qui sont qui sont libéraux en free-lance. En effet ce n’est pas tout à fait la même chose : être libéral c’est avoir une capacité d’offres, et être en free-lance, au sens d’intermittent, est complètement différent.

La deuxième question est plus théorique et rejoint celle de Roger Perrinjaquet : peut-il exister un urbanisme qui ne soit pas d’État ? L’urbanisme n’est-il pas toujours une activité régalienne ? On peut être urbaniste de l’État ou éventuellement être urbaniste des collectivités locales, mais c’est à peu près la même chose (on ne rentrera pas dans les détails). Ainsi peut-on exercer à titre libéral et avoir ce rôle ? Il s’agit du rapport entre une profession et une activité. Il m’arrive quelque fois de dire qu’il n’y a d’urbanisme que colonial. Il est intéressant de penser la position de l’urbanisme en termes de profession.

Anne-Michèle Donnet : Concernant le nombre de libéraux par rapport au nombre d’urbanistes qualifiés ou le nombre d’architectes parmi les urbanistes qualifiés, je ne dispose pas encore de chiffres et en tout état de cause, le nombre actuel d’urbanistes qualifiés ne permettrait pas de faire des analyses significatives3.

La deuxième remarque me rappelle un directeur départemental de l’équipement qui avait déclaré que l’urbanisme était une prérogative d’État. Mais c’était avant les lois de décentralisation. Aujourd’hui la région a en charge l’aménagement du territoire, le département mène un certain nombre de politiques qui ont également à voir avec l’aménagement du territoire. Les nouvelles lois, la loi Solidarité et Renouvellement Urbains, la loi Voynet et la loi Chevènement, qui s’articulent d’une manière qui reste à clarifier, donnent des responsabilités aux collectivités territoriales dans ce domaine. Pour mener leurs politiques, pour définir leurs stratégies, réaliser leurs Schémas de Cohérence Territoriale, elles auront besoin d’urbanistes. Ces urbanistes seront-ils des libéraux ? De nouvelles structures d’administration locales seront-elles créées ? L’État sera-t-il le maître d’œuvre pour le compte des collectivités ? Les agences d’urbanisme auront-elles là un champ d’activités nouveau ou étendu ? Rien n’est arrêté aujourd’hui.

Jacques Allégret : François Lautier a négligé une perspective, quand il parle d’urbanisme régalien, perspective plus ancienne mais réactivée grâce au développement durable, celle de la démocratie participative et de la figure d’urbaniste d’advocacy planning.

Anne-Michèle Donnet : Celle-ci devrait retrouver une place importante dans ce qui est mis en place dans les comités de pays par la loi Voynet, qui prévoit un comité consultatif impliquant des citoyens, il s’agit du conseil de développement.

Jacques Allégret : Ils auront besoin d’urbanistes pour se défendre contre l’État.

Anne-Michèle Donnet : Et aussi pour entendre ce qui est dit et le structurer. Quand on travaille avec des publics « non professionnels », une phase importante consiste à leur faire cerner leurs besoins ou projeter leurs souhaits, à les faire dépasser leur quotidien. En effet, quand on demande à des habitants, par exemple, de travailler sur un programme concernant leur environnement, leur première réaction est très décevante. Il y a un travail d’aller-retour important qui prend du temps.

Thérèse Evette : Je pense que l’advocacy planning ne sert pas simplement à se défendre contre l’État. Jacques Allégret évoquait la démocratie et la citoyenneté. Je me demande si la profession d’urbaniste peut se définir par rapport à des valeurs de ce type. Est-ce que ça apparaît d’une manière ou d’une autre dans les dossiers que vous instruisez ?

Anne-Michèle Donnet : La citoyenneté est effectivement un des thèmes qui traverse les débats actuels. L’année dernière, la Nouvelle Charte d’Athènes (SFU, 1998) avait été portée à la fois par le CFDU et la SFU en propre. Le but est d’avoir des débats aussi nombreux que possible. La notion d’intérêt public est au cœur de la définition du métier d’urbaniste.

1 Quartier, commune, département, échelle nationale ou internationale.

2 Les urbanistes choisis sont des urbanistes désignés par les « familles » fondatrices de l’OPQU. Ils sont désignés pour trois ans et demanderont leur

3 On ne peut parler que de tendances, les dossiers des architectes libéraux sont plus facilement étudiés. Ils représentent peut-être un tiers des

Frey J.-P., 2001, « La ville des architectes et des urbanistes », in : La ville et l’urbain, état des savoirs, La Découverte, Paris.

Société Française des Urbanistes, 1998, Charte pour l’urbanisme des villes du XXIe siècle, SFU, Paris.

1 Quartier, commune, département, échelle nationale ou internationale.

2 Les urbanistes choisis sont des urbanistes désignés par les « familles » fondatrices de l’OPQU. Ils sont désignés pour trois ans et demanderont leur qualification, s’ils le souhaitent, à l’issue de ces trois ans et leur dossier sera examiné selon la même procédure que celle qui est en cours aujourd’hui.

3 On ne peut parler que de tendances, les dossiers des architectes libéraux sont plus facilement étudiés. Ils représentent peut-être un tiers des urbanistes qualifiés. Les urbanistes exerçant en libéral, venant d’autres formations, représentent peut-être un quart.

Anne-Michèle Donnet

FNAU, syndicat des personnels d’agence. Directrice de l’agence d’Urbanisme de Metz.
2 place d’armes 57000 Metz
agurameid@id-nef.fr