Contributions et débats — V —

Jean-Michel Coget, Michel Bonnet et Guy Tapie

p. 106-107

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Jean-Michel Coget, Michel Bonnet et Guy Tapie, « Contributions et débats — V — », Cahiers RAMAU, 1 | 2000, 106-107.

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Jean-Michel Coget, Michel Bonnet et Guy Tapie, « Contributions et débats — V — », Cahiers RAMAU [En ligne], 1 | 2000, mis en ligne le 07 novembre 2021, consulté le 01 mai 2024. URL : https://cahiers-ramau.edinum.org/581

Michel Bonnet Je trouve qu’à force de mettre tout sur le même plan, le processus de présentation est assez réducteur. A propos de la question des armoires à plans, Jean-Michel Coget dit qu’elles compliquent les processus de coordination, le jeu des acteurs. Que le jeu des acteurs soit compliqué du fait qu’il y a des jeux différentiels de prises de pouvoir autour de l’armoire à plans, instrument de coordination technique fabuleux, je suis d’accord. Cependant, j’avais cru comprendre que les armoires à plans permettaient quand même des coordinations et des gains fantastiques dans la gestion de projets. Je pense qu’il ne faut pas l’oublier. J’aimerais savoir ce qu’en pense Guy Tapie, qui, en tant que chercheur, a analysé une des premières expéri­mentations sur les armoires à plans, du point de vue des logiques d’acteurs, des logiques professionnelles. Il est évident que les armoires à plans compli­quent certaines choses, mais elles en facilitent d’autres.

Jean-Michel Coget Dans mon propos, il y a une réponse à cette remarque. Ce n’est pas tant l’armoire à plans que j’ai remis en cause, c’est le fait de créer un acteur en plus, sous le prétexte d’armoire à plans. L’outil peut être très intéressant, mais il peut être renvoyé par exemple à l’architecte, qui peut s’en servir aussi. Je ne remets pas en cause l’outil, mais l’usage qui en est fait et la multiplication des acteurs autour des outils.

Michel Bonnet Cela me gêne encore, parce que finalement, d’un point de vue sociologique, on constate des processus de division du travail, de différenciation de la division technique du travail, concomitant de l’évolution des techniques. Le fait d’ajouter un acteur me paraît donc assez logique. Je ne porte pas de jugement de valeur sur la nécessité de cet acteur, mais il est assez logique que le processus de division du travail se différencie et fasse émerger des acteurs nouveaux, des compétences nouvelles ou des spécialités nouvelles.

Jean-Michel Coget Mon point de vue n’est pas personnel, mais c’est le point de vue de la coordination. On m’a demandé de faire une intervention sur la coordination et du point de vue de la coordination, si on ajoute un acteur, on ajoute des coûts de coordination.

Intervenant J’aimerais faire une remarque en disant que l’adjonction de nouveaux acteurs est un effectivement un problème. Cependant, si on veut vraiment progresser dans nos réflexions, il faut immédiatement casser ce schéma en deux, en disant qu’il y a vraiment deux types d’acteurs horizontaux qui sont complètement différents, même s’ils sont sous la même étiquette. C’est, et je veux bien garder le terme d’acteurs horizontaux, ceux qui reconstituent des nouvelles spécialités par produit. Par exemple, un programmiste se spécialise sur les établissements scolaires : c’est un hyperspécialiste, non pas au sens de spécialité du métier. Notamment par rapport à la production d’innovations, ça ne se passe pas du tout de la même façon : il va bien produire de l’information très spécialisée, mais ne va pas être innovant comme quelqu’un qui est dans sa logique de métier ; ce n’est pas du tout le même type d’innovation. D’un autre côté, il y a effectivement les acteurs horizontaux, qui, eux, se spécialisent plutôt, si j’ose dire, dans la coordination de savoirs hétérogènes. Il y a d’une part une nouvelle dynamique de la spécialisation, dont je veux bien parler en terme d’horizontal, et d’un autre côté, il y a la coordination un peu au sens classique de circulation entre des choses hétérogènes. Il me semble qu’on peut éclairer aussi cette question de nouveaux acteurs à partir de cette distinction.

Guy Tapie J’aimerais faire une remarque à propos des expériences sur les armoires à plans qu’on a analysées. Il me semble qu’elles étaient aussi portées par des acteurs de la maîtrise d’œuvre et qu’elles s’inscrivaient également dans cette référence à la notion de synthèse (qui, je crois, est incluse dans la nouvelle loi Mop), qui faisait le lien entre la maîtrise d’œuvre d’exécution et le chantier. Il semblait effectivement que les armoires à plans étaient utilisées comme un support et un moyen technique pour mettre en phase différents types d’acteurs ou différents types de plans, de la maîtrise d’œuvre ou des entreprises. Ces expériences étaient sous l’autorité d’acteurs de la maîtrise d’œuvre, que ce soit des bureaux d’études techniques ou des architectes. Je connais moins la manière dont s’est opéré le transfert de ces outils entre le monde de l’industrie et le monde de la construction, mais il me semble que les armoires à plans, à un moment donné, étaient aussi portées – et sans doute le sont-elles encore aujourd’hui – par des sociétés d’ingénierie, du monde de la construction.