Robin Nicholson, architecte praticien à Londres, ancien président du Construction Industry Council

Pratiques et parcours

Olivier Chadoin and Robin Nicholson

p. 101-103

References

Bibliographical reference

Olivier Chadoin and Robin Nicholson, « Robin Nicholson, architecte praticien à Londres, ancien président du Construction Industry Council », Cahiers RAMAU, 3 | 2004, 101-103.

Electronic reference

Olivier Chadoin and Robin Nicholson, « Robin Nicholson, architecte praticien à Londres, ancien président du Construction Industry Council », Cahiers RAMAU [Online], 3 | 2004, Online since 03 November 2021, connection on 04 December 2024. URL : https://cahiers-ramau.edinum.org/502

Robin Nicholson1 est architecte dans l’agence Thirty strong à Londres. Son agence travaille sur une gamme de projets relativement complète, depuis la planification et la conception urbaine, jusqu’à des projets architecturaux de petites tailles ; cela aussi bien au niveau de l’esquisse qu’au niveau des détails d’exécution.

Il définit sa position comme celle d’un « architecte traditionnel », au sens où il privilégie dans son travail la possibilité de diriger l’équipe de conception et de garder la direction des projets durant tout leur processus de développement. Néanmoins, il constate que cette conception généraliste est aujourd’hui bousculée par de nombreux changements qu’il a lui-même accompagnés avec la mise en place du « Mouvement pour l’innovation » (Movement for Innovation, Cf. Winch).

Gérer les relations interprofessionnelles

Ainsi, aujourd’hui, un objectif simple et essentiel consiste à réfléchir sur la division du travail entre les différentes spécialités professionnelles intervenant dans la construction. Comment les architectes peuvent-ils travailler avec les autres professionnels de la maîtrise d’œuvre, sur une base égale au sein d’une équipe intégrée, capable d’organiser la participation des clients, voire des futurs utilisateurs ? Le problème consiste à trouver une manière de formaliser les rapports entre chacun, qui permettra d’opérer sur une base d’égalité.

En termes de méthode de travail, l’agence de Robin Nicholson s’intéresse en particulier à trois directions de développement : d’abord, la construction à prix réduit sur la base de systèmes préfabriqués dont la construction est très rapide et offre des possibilités architecturales intéressantes ; ensuite, les solutions techniques de gestion de l’énergie ; enfin, la consultation des clients ou des utilisateurs, qui est une partie essentielle du processus de conception. Ce sont ces directions qui guident sa réflexion sur le secteur de la construction.

Du bâtiment aux services

Pour comprendre les pratiques architecturales anglaises, il est important de rappeler que, pendant la période du gouvernement de Mme Thatcher, les règles de contrats et de marchés concurrentiels ont affaibli les autorités locales en place et déplacé beaucoup de compétences du secteur de l’État vers le secteur privé. De ce point de vue, le PFI (Private Finance Initiative) est un changement radical en termes de pensée. Les bâtiments ne sont en effet plus pensés comme des produits, mais comme des services. Or, c’est là une notion très difficile à saisir pour certains architectes.

Selon Robin Nicholson, le plus important à comprendre, c’est que pour la première fois les clients, ainsi que l’industrie du bâtiment, ont été organisés en corps. Tous les acteurs ont été réunis autour d’une table, avec le client, membre principal de l’équipe, et un représentant de tous les professionnels de la construction (architectes, ingénieurs et constructeurs). Un des points d’accord et de conclusion issu de cette rencontre est l’engagement des professionnels pour un meilleur environnement. Cette notion chère au travail de Thirty strong a donc été suivie d’engagements au moins à travers deux projets : un bâtiment pour un bureau international du béton « prêt à mélanger » et la construction d’immeubles de bureaux comprenant une réflexion sur la gestion énergétique.

Du produit au processus

Après le renouvellement du gouvernement anglais, le 1er mai 1997, des changements importants sont intervenus dans l’organisation territoriale de la vie politique, qui se poursuivent encore aujourd’hui, notamment avec l’établissement des agences de développement régional (Etablishment of Regional Development).

Ce renouveau engage en fait un processus de décentralisation qui conduit à réviser le potentiel de l’industrie du bâtiment et sa régénération à travers le pays. En particulier, le rapporteur John Egan a mis en avant le fait que le système de construction anglais était, du point de vue des clients les plus importants, trop cher, trop lent, et mal conçu : finalement, trop dangereux et insuffisamment tourné vers ses clients. De même, l’insuffisance de recherche et d’évaluation auprès des utilisateurs a été pointée.

Effectivement, dans n’importe quel autre secteur industriel, le cycle économique comprend des phases d’étude, de conception, de fabrication et finalement d’évaluation. Autrement dit, selon Egan, l’industrie anglaise de la conception manque avant tout de dispositifs de capitalisation et de retour sur expérience. Pour cet auteur, il faut donc innover en s’intéressant plus au processus qu’au produit. Ce travail a donc donné lieu à des recherches et des expérimentations interdisci­plinaires sur la qualité des constructions et l’optimisation des processus, dans lesquels Robin Nicholson s’est lui-même engagé.

De l’intérêt privé à l’engagement public

Cette nouvelle conception centrée sur l’amélioration de la qualité des constructions et l’efficacité des processus a été conduite avec des clients importants et engageait alors de grands enjeux financiers. Les supermarchés, par exemple, dont la construction prenaient jusque-là presque une année ont vu celle-ci réduite à seize semaines ; ce qui représente une économie substantielle pour ce secteur. Evidemment une telle approche n’est pas possible pour tous les bâtiments. Aujourd’hui, le gouvernement anglais a accueilli ces changements favorablement et des évolutions durables ont désormais lieu dans l’ensemble du secteur de la construction.

Comme l’attestent les projets d’expérimentation menés dans le cadre de ce Mouvement pour l’innovation, il est désormais possible souligne Robin Nicholson, de travailler plus rapidement et à un moindre coût, tout en produisant une réelle qualité architecturale. Ces projets de démonstration du Mouvement pour l’innovation, ont d’ailleurs été accueillis dans des espaces géographiques qui coïncident avec les agences de développement régional. Ce fait est essentiel dans la mesure où il montre la possibilité, sur une base régionale, d’apporter des méthodologies de construction nouvelles aux côtés des structures politiques émergentes.