John A. Wright, architecte praticien, président de l’Association of Consultant Architects (ACA), vice‑président du Royal Institute of British Architects (RIBA)

Pratiques et parcours

Olivier Chadoin et John A. Wright

p. 107-110

Citer cet article

Référence papier

Olivier Chadoin et John A. Wright, « John A. Wright, architecte praticien, président de l’Association of Consultant Architects (ACA), vice‑président du Royal Institute of British Architects (RIBA) », Cahiers RAMAU, 3 | 2004, 107-110.

Référence électronique

Olivier Chadoin et John A. Wright, « John A. Wright, architecte praticien, président de l’Association of Consultant Architects (ACA), vice‑président du Royal Institute of British Architects (RIBA) », Cahiers RAMAU [En ligne], 3 | 2004, mis en ligne le 03 novembre 2021, consulté le 03 décembre 2024. URL : https://cahiers-ramau.edinum.org/506

Les textes présentant les « pratiques et parcours » de professionnels ont été rédigés par Olivier Chadoin à partir des interventions orales des intéressés lors des rencontres Ramau 2002.

Le point de vue que développe John A. Wright1 concerne plus particulièrement l’un des modes contractuels essentiels introduit par la révision des processus de conception en Grande-Bretagne : le partnering (déjà évoqué dans les présentations de Robin Nicholson et Mehron Kirk). En effet, cette nouvelle manière de penser la construction, si elle est soutenue par les associations professionnelles, engendre malgré tout de nombreuses modifications d’attitude chez les professionnels de la construction.

Repenser la construction

Au cœur de la révision de la construction en Grande-Bretagne se trouve la conviction qu’un processus intégré de projet fournira de meilleurs résultats au client et à l’utilisateur. Il s’agit de produire des projets de qualité dans des délais et des coûts réduits. Pour ce faire, le processus doit être en mesure de combiner les talents au sein d’une équipe de projet durant tout le déroulement du processus, tout en restant concentré sur les besoins du client, des futurs utilisateurs et de la communauté dans son ensemble.

Un aspect central dans la mise en place de cette vision intégrée des processus est la constitution d’équipes de projet dites de partnering. Une équipe de partnering comprend le client et, si possible, les utilisateurs, l’architecte, ainsi que d’autres conseillers. Pour John A. Wright, les expériences de construction menées sous cette forme montrent qu’elles débouchent sur un travail collectif efficace et concentré sur des buts communs. Pour atteindre son but, l’équipe engagée dans le partnering de projet doit effectivement à la fois poursuivre des objectifs partagés et clairement articulés, mettre en place une méthode de résolution des problèmes, s’engager dans une volonté d’amélioration continue et, enfin, contrôler les risques.

Si cette méthode est convenablement conduite, ses avantages vont bien au-delà d’une simple économie financière, pour atteindre plusieurs résultats tels que la satisfaction du client et de l’utilisateur final, l’élimination des barrières qui se sont développées dans le passé entre les différents intervenants du processus de construction, le développement d’un environnement de confiance et, enfin, une réduction des gaspillages et des pertes de confiance par l’obtention de choses bien faites dès la première fois et « juste à temps ». Pour atteindre ces buts, les équipes de projet s’appuient sur des méthodes d’évaluation et d’analyse de la valeur, inspirées du secteur industriel.

Des indicateurs de suivi

Les avantages de cette approche de la construction, relevés par John A. Wright, sont de mieux en mieux compris et soutenus par les organes de contrôle du secteur public. Cependant, pour satisfaire ces acteurs il est essentiel, d’une part, de faire preuve d’un suivi rigoureux et clairement documenté des processus et, d’autre part, de démontrer une capacité d’amélioration continue de l’efficacité des processus mis en place.

Pour juger de cette efficacité, on dispose d’un indicateur principal d’exécution (KPI) qui mesure la qualité et l’efficacité d’exécution d’un projet relativement à l’organisation de son processus. Dans l’industrie du bâtiment, les données ainsi collectées sont publiées depuis 1999 et sont mises à jour annuellement. Ces données permettent une évaluation qui couvre tous les aspects de la construction : la satisfaction, les défauts, la prévisibilité, la rentabilité, la productivité et la sécurité pour le client. Autrement dit, elles fournissent une évaluation appuyée sur la définition d’indicateurs et de graphiques, permettant une analyse simple des résultats de chacun relativement à d’autres.

Le partnering

Après avoir établi les besoins de ces acteurs, l’architecte et les autres professionnels associés doivent développer des objectifs de projet et établir un budget réaliste et solide, étayé par la recherche de la meilleure solution. Ensuite, il s’agit d’évaluer correctement les exigences réglementaires ou de normalisation auxquelles l’équipe devra répondre. C’est seulement une fois ces étapes franchies, que l’équipe engagée dans le partnering est constituée.

Lorsque les objectifs sont clairement établis, le client est en mesure de s’engager dans la constitution de l’équipe de projet. A ce niveau, la confiance est un élément déterminant. Ainsi, les clients qui entreprennent régulièrement des projets de construction et ont développé des habitudes et des affinités avec des architectes, des conseillers ou autres... se tournent souvent d’abord vers ces derniers. Cependant, pour la majorité des clients, les équipes sont construites pour la première fois. Dans tous les cas, il est impératif que ces rapports ou alliances engagées sur le long terme conduisent à une amélioration de l’exécution de projet en projet, capitalisant ainsi l’expérience.

Les règles du partnering

Une règle de base du partnering, exposée par John A. Wright, est que le choix des intervenants ne doit jamais être réalisé sur des bases économiques qui seraient celles du « moins disant ». Dans la mesure où il s’agit d’établir d’étroites relations de travail, le choix des associés doit plutôt être raisonné en fonction des compétences et des apports de chaque professionnel. Pour réussir, le partnering doit privilégier la capacité des personnes à travailler en équipe, à être dynamiques, innovantes et capables d’offrir des solutions efficaces et positives. Cependant, une recommandation est plus forte encore : le choix de l’équipe du partnering doit se faire en fonction du projet le mieux adapté à la situation du client. A cet égard, le processus de choix basé sur une définition concurrentielle de la qualité fournit une manière pratique de choisir les associés potentiels. Déjà employé intensivement par ailleurs, il se banalise aujourd’hui au Royaume-Uni pour les secteurs publics et privés. Globalement, ce procédé permet au client d’évaluer l’apport de chacun des intervenants, sur des critères de sélection établis à partir d’une approche de la valeur globale du projet.

Ces mesures initiales sont essentielles pour que le client constitue un groupe consultatif de projet, composé de personnes (des utilisateurs et des opérateurs) qui le suivront dans son déroulement et jusqu’à sa livraison. Ce groupe consultatif engage sa mission par l’identification des objectifs du projet en termes de produit et de processus. Il est un acteur essentiel pour l’identification complète des facteurs qui détermineront le succès ou l’échec du projet. L’identification de ces facteurs est aujourd’hui formalisée dans un questionnaire de choix destiné aux associés potentiels. Dans ce cas, le client invite les candidats à remplir les questionnaires et à soumettre des « rapports argumentés sur la qualité ». Les candidats retenus sont ensuite invités à fournir des informations complémentaires lors d’entrevues destinées à évaluer, classer et finalement choisir le meilleur candidat.

C’est après cela seulement que l’équipe de projet commence son travail. Dès lors, Il est important que des ateliers soient menés et animés pendant tout le déroulement du projet. Le nombre exact d’ateliers qui se tiennent dépend entièrement du projet, de sa taille et de la nécessité de créer et de soutenir un esprit d’équipe. Un consultant indépendant pourra, par ailleurs, aider l’équipe dans le développement de ces ateliers durant toute la vie du projet. Enfin, de façon à préserver la cohésion de l’équipe, il est recommandé de débuter la tenue de ces ateliers à distance des pressions du projet réel. Il s’agit d’abord de construire un environnement « neutre d’intérêt », où les membres de l’équipe peuvent apprendre à travailler ensemble, se connaître et établir des rapports de confiance sans perspectives commerciales.

La réception du partnering par les concepteurs

Comment un tel changement des habitudes est-il perçu par les concepteurs ? John A. Wright estime que ceux qui travaillent maintenant régulièrement dans ce type d’équipes apprécient vraiment la dynamique créatrice de ce processus. Néanmoins, cette appréciation n’est pas unanime.

Il reste que, dans de telles configurations, tous les acteurs du processus ont, selon John A. Wright, une possibilité véritable et égale d’apporter une contribution positive à la conception. Un tel environnement libère réellement les concepteurs pour qu’ils soient vraiment créateurs. Aussi, John A. Wright pense-t-il que la résistance à cette forme de travail, répandue parmi de petits praticiens du Royaume-Uni, est infondée et que ces réactions défensives s’estomperont donc progressivement.

Les ingénieurs, en particulier, vont devoir comprendre cette conception nouvelle de la construction, commencer à évaluer normalement les risques, et prendre en considération la nécessité de travailler avec des architectes. Dans ce processus, John A. Wright estime en effet qu’il n’y a pas de dominant a priori et que la conduite du projet doit être gagnée dans le processus lui-même. Cela étant dit, les architectes, du fait d’une formation généraliste, semblent être en bonne position pour s’imposer dans la conduite des processus. Pour autant, ils doivent pour cela développer une capacité au travail en équipe. Qui plus est, le développement de ce type d’équipe devrait permettre la constitution de véritables équipes multidisciplinaires, capables de capitaliser une expérience de projet en projet, et ainsi mettre un terme à la constitution d’équipes au coup par coup qui engage les profes­sionnels à « faire leurs emplettes » à chaque projet.